Homélie du dimanche 10 mars 2024, 4ème
de Carême B : serpent magique
L’Evangile fait référence à un serpent de
bronze élevé par Moïse dans le désert. Cela mérite peut-être un petit rappel
d’autant que le livre des Nombres n’est généralement pas notre livre de
chevet. Puis voyons cela peut bien signifier pour
nous aujourd’hui. |
Nombres 21 [5] Le peuple se mit à critiquer Dieu et Moïse [.] [6] Alors le SEIGNEUR
envoya contre le peuple des serpents brûlants qui le mordirent, et il mourut
un grand nombre de gens en Israël. On devine la suite… [7] Le peuple vint trouver Moïse en
disant : " Nous avons péché en critiquant le SEIGNEUR et en te
critiquant ; intercède auprès du SEIGNEUR pour qu'il éloigne de nous les
serpents !. " Moïse intercéda pour le peuple, [8] et le SEIGNEUR lui dit
: " Fais faire un serpent brûlant et fixe-le à une hampe : quiconque
aura été mordu et le regardera aura la vie sauve.. " Mais comment fabriquer un serpent brûlant ? En pratique, Moïse fit forger un serpent de bronze ou airain (vieux
mot pour bronze, alliage de cuivre et d’étain) qu’il fixa en haut d’un bâton. Les personnes mordues
par un serpent et qui le regardaient étaient alors sauvées. En fait, l’hébreu étant une langue imagée,
la traduction littérale serait « serpent
serpentin ». On visualise d’ailleurs volontiers un
serpent serpentant, un serpent enroulé en haut d’une hampe. Image que l’on pourrait rapprocher de
l’antique bâton du dieu guérisseur grec Asclépios et du caducée actuel des
médecins. Toujours est-il que Dieu invite Moise à
transformer symboliquement le serpent mortel en moyen de guérison. La source
de mort devient instrument du salut. Mais ce n’est qu’un instrument ! Celui
qui guérit et qui sauve reste Dieu. |
Malheureusement, le peuple finira par
oublier l’auteur du salut et en viendra à adorer le serpent de bronze
lui-même comme un objet magique ou pire comme une divinité. Quelques siècles plus tard, Ezékias, le roi réformateur, préféra le détruire pour aider le peuple à
revenir à une foi plus pure au Dieu unique. [II Rois 18] [4]C'est lui qui fit disparaître les hauts
lieux, brisa les stèles, coupa le poteau sacré et mit en pièces le serpent de bronze que Moïse avait
fait, car les fils d'Israël avaient brûlé de l'encens devant lui De la même manière, il peut être bon pour nous de nous séparer
de certaines choses en apparence utiles dans nos vies mais qui en réalité
nuisent à notre liberté en Christ. Le Carême nous est ainsi donné comme un
temps privilégié de libération. |
Retour à la source : élévation d’un
serpent sur une hampe = la source de mort devient instrument du salut. Pour nous chrétiens, le transfert est assez
évident avec la croix du Christ : l’instrument de torture et de mort
devient avec le Christ Jésus le lieu même de notre salut. « De même que le
serpent de bronze Notez bien cependant la référence salutaire
à la foi. Il ne suffit pas de regarder un crucifix
(qu’il porte ou non le Christ Jésus) pour être sauvé. Il ne suffit pas de
porter une croix autour du cou pour être protégé et une croix dans une maison
n’est pas un talisman de protection… Cela n’a rien de magique ! Ce n’est pas
l’instrument de la croix qui nous sauve mais Dieu qui nous a sauvés par le
moyen de la croix ; salut donné sans condition quoique reçu sous réserve
de l’adhésion de la foi. |
Anecdote de St François devant le sultan et
piétinant sans gène son tapis « de croix ». De même ne nous scandalisons pas tant devant
les provocations plus ou moins blasphématrices envers nos symboles de foi que
des atteintes directes à notre foi au Dieu Vivant en particulier dans la
négation même parfois de la vie déjà conçue. |
La mentalité magique, coin enfoncé pour
fendre l’unité de notre foi, n’est jamais très loin de nous : talisman
protecteur, fréquentation de « guérisseurs », astrologie et
voyance, invocation de la chance, négations idéologiques de la réalité… Conclusion avec St Paul aux Ephésiens : C’est Dieu qui nous
a faits, il nous a créés dans le Christ Jésus, Que l’Esprit Saint nous donne de vivre
concrètement notre foi. AMEN |