Les Prêtres Déportés sur les Pontons de Rochefort

 

15-16 octobre 2005

 

10ème anniversaire de la béatification

de Jean-Baptiste SOUZI et de ses compagnons martyrs.

 

 

 

 

Le chemin de Croix des déportés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1er tableau :

Description : à Gethsémani , Jésus va à l’écart pour prier et demande à ses disciples de veiller mais ils s’endorment. / Jésus est saisi d’angoisse et un ange le console / Le baiser de Judas / l’arrestation (mais pas d’épée !) / le Grand prêtre Caïphe / le reniement de Pierre [NB : le coq est le symbole de la France]

 

                   EGLISE

 

Nous sommes en France, en l’an 1791.

C’est la révolution, poussée par l’esprit des Lumières et soutenue par la majorité du clergé.

Mais les réformateurs se laissent éblouir par leur propre lumière. Voulant réformer l’état, ils veulent aussi d’eux-mêmes réformer l’Eglise qui lui est très liée : ils pensent l’Eglise comme une simple institution sociale, purement humaine.

Les ordres jugés inutiles sont dissous (chanoines, moines et religieuses)…

 

Donnant une Constitution au pays, les députés veulent aussi donner une Constitution à l’Eglise de France sans voir qu’ils attentent ainsi à sa Constitution divine.

 

         Mc 14

[29] Pierre lui dit : "Même si tous succombent, du moins pas moi !"

[30] Jésus lui dit : "En vérité, je te le dis : toi, aujourd'hui, cette nuit même, avant que le coq chante deux fois, tu m'auras renié trois fois."

[31] Mais lui reprenait de plus belle : "Dussé-je mourir avec toi, non, je ne te renierai pas." Et tous disaient de même.

 

 

Sans le vouloir, la France sombre dans la nuit. Le roi signe la Constitution. Le pape se tait longtemps puis condamne. Le roi se dédit. Des curés jurent, conjurent, injurent, abjurent, parjurent… C’est la confusion, la nuit.

Il y a +/- 50% d’assermentés dans le clergé paroissial.

 

Et nous, comment vivons nous aujourd’hui notre attachement à l’Eglise de Dieu ?

 

 

Prions :

Seigneur Jésus, nous professons chaque dimanche que nous croyons en ton Eglise.

Aide nous à comprendre qu’elle n’est UNE, SAINTE, CATHOLIQUE, et APOSTOLIQUE que parce qu’elle se repose sur toi, que tu en es la source et la fin, que nous sommes ton Corps.

De même que notre propre corps ne nous appartient pas mais qu’il est pour Toi, apprends-nous à aimer ton Corps qui est l’Eglise.

 

         Refrain :

 

Nous sommes le corps du Christ,

Chacun de nous est un membre de ce corps.

Chacun reçoit la grâce de l’Esprit,

Pour le bien du corps entier.

Chacun reçoit la grâce de l’Esprit,

Pour le bien du corps entier.

 

 

2. Dieu nous a tous appelés des ténèbres à sa lumière,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

Dieu nous a tous appelés à l’amour et au pardon,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

 

 

 

 

2ème tableau :

Description : devant Pilate / la flagellation / roi et prophète / lavement des mains / à mort ! à mort !

 

         FIDELITE

 

1793, le pays est en guerre. L’ensemble de l’Europe est coalisé contre la République française ;.

Dans cette circonstance, les prêtres non-jureurs sont assimilés à un ennemi intérieur, la 5ème colonne des monarchies. Des massacres de prêtres ont lieu à Paris (Pierre-Louis de La Rochefoucauld, évêque de Saintes fait parti des victimes) et des exécutions sommaires ont lieu à Nantes.

On décide de leur exil. Puis pour éviter qu’ils n’aillent enrichir les armées adverses et « empoisonner nos voisins de cette peste publique » (38) , on se décide à les déporter en Guyane ou en Afrique…

Des convois de prêtres sont acheminés vers les ports de Bordeaux et de Rochefort.

 

Le long du chemin, les prêtres subissent fouillent (surtout à Poitiers) et outrages, y compris de la foule  

 

Jn 19

[15] Eux vociférèrent : "A mort ! A mort ! Crucifie-le !"

 

 La plupart aurait encore pu s’échapper mais ils refusent de fuir, acceptant la déportation au nom du Christ comme une chance donnée à l’évangélisation des peuples lointains.

 

Comme la guerre aux frontières et en Vendée s’intensifie, la fureur anti-insermentés tourne à la haine anti-cléricale et anti-chrétienne : des vieillards et mêmes des prêtres jureurs sont arrêtés.

 

Et nous, comment régissons-nous lorsqu’on nous insulte ou que l’on se moque de nous à cause de notre foi ?

 

Prions :

Seigneur Jésus, par fidélité à ton Nom, de nombreux prêtres ont refusé d’abandonner ton troupeau, ils ont refusé de fuir et ont accepté « que ta volonté soit faite ».

A leur exemple, donne-nous Seigneur de ne pas fuir nos responsabilités dans l’annonce de ton Evangile au monde. Donne-nous d’être fidèles à notre baptême et à être fiers de notre foi même sous les insultes ou les rires des autres.

 

 

 

4. Dieu nous a tous appelés à la paix que donne sa grâce,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

Dieu nous a tous appelés sous la croix de Jésus Christ,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

 

 

 

 

3ème tableau :

Description :Jésus porte sa croix / chute et réquisition de Simon de Cyrène / sainte Véronique

 

                   ESPERANCE

 

Les convois se succèdent à Rochefort. Les prisons sont pleines. On se décide à les entasser sur 2 négriers, le Washington et les Deux Associés.

L’abbé de La Romagère dira « Les matelots (des Deux Associés) nous assurèrent qu’on y aurait fait entrer tout au plus 2 ou 3 cents nègres ».79)

Ils furent 409 prêtres à bord des Deux Associés. Les armateurs négriers avaient « intérêt à ménager la cargaison humaine pour l’acheminer sans perte » (78). Les prêtres ne présentaient pas le même intérêt…

 

A Paris, la Convention hésite sur le sort à donner à ces prêtres. Leur entretien coûte cher. Les envoyer en Guyane ou en Afrique serait un cadeau empoisonné pour les indigènes, ce serait les livrer à l’obscurantisme et à la superstition. Mieux vaudrait les jeter sur les côtes arabes où ils subiraient leur juste sort… On ne sait plus où on en est.

 

Les prêtres, coupés du monde, se préparent au voyage et à la tâche d’évangélisation qui les attend au delà des mers.

Jean-Baptiste SOUZI, vicaire général de La Rochelle, donne à tous les pouvoirs ecclésiastiques nécessaires : « dans le cas où vous arriveriez dans des pays qui ne seraient catholiques, vous y prêcheriez la foi comme missionnaires de l’évêque de La Rochelle ».

 

Lc 23

28 Jésus dit : "Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants !

 

Et nous qui croyons en Dieu, savons-nous toujours vivre le présent comme une chance et regarder l’avenir avec optimisme ?

 

 

Prions

Seigneur, comme les prêtres déportés qui ne se sont pas apitoyés sur leur sort mais ont toujours su regarder l’avenir avec espérance,

Donne-nous de toujours voir le bon côté des choses.

Apprends-nous à aimer ce monde que tu as fait, que tu nous as donné et auquel nous sommes donnés.

 

 

 

 

1. Dieu nous a tous appelés à tenir la même espérance,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

Dieu nous a tous appelés à la même sainteté,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

 

 

4ème tableau :

Description :Jésus est dépouillé / cloué / croix / « sauves-toi toi-même » / partage des vêtements

 

         SACRIFICE

 

 

On ne peut se résoudre à expatrier la mauvaise graine des prêtres. La guerre et la Terreur font rage. On a autre chose à faire que de s’occuper de ces foutus prêtres…

Leur longue agonie à bord des bateaux commence. Les bateaux sont au large pour éviter que la population ne s’apitoye. Les soldats s’évertuent à détruire ces hommes moralement, spirituellement et physiquement

 

On leur confisque leurs ultimes biens et en particulier leurs livres de prière (l’un deux échappera à la fouille, caché dans un morceaux de pain). Le latin est interdit ainsi que toute prière :

(138) « Si on nous eût vus seulement remuer les lèvres pour satisfaire aux premiers devoirs de la religion, sur –le champ nous aurions été mis au fers ».

(139) sur le Washington, « un petit livre, intitulé « journée chrétienne, avait échappé au naufrage général des objets de piété ; il devint une ressource pour alimenter la ferveur des prisonniers. Du matin au soir, à la lucarne de l’entrepont, un déporté lisait, pour son édification, dans ce livre »

 

La saleté à bord est épouvantable.

«(81) la nuit touchait à peine à son milieu que des flots d’ordures et d’immondices coulaient de toutes parts et nous inondaient, en même temps qu’ils répandaient partout la corruption et la mort ».

Mais, malgré la vermine et la nourriture infecte et insuffisante, les prêtres ne meurent pas assez vite au gré du capitaine Laly qui inventa un autre supplice en asphyxiant les prêtres au moyen de boulets portés au rouge et plongés dans un tonnelet de goudron : méthode utilisée dans la marine pour tuer la vermine..

 

Mt 27

[ils] l'injuriaient en hochant la tête[40] et disant : "Toi qui détruis le Sanctuaire et en trois jours le rebâtis, sauve-toi toi-même  (.)

[43] Il a compté sur Dieu ; que Dieu le délivre maintenant, s'il s'intéresse à lui !

 

 

 

(139) Le capitaine Laly «  nous dit que nous devions être très contents, qu’il connaissait notre religion et qu’elle disait : « bienheureux ceux qui souffrent »

 

 

Et nous, quand viennent les quolibets ou les moqueries, nous réjouissons-nous d’être jugés dignes de souffrir pour notre Dieu ? 

Ac 5, 41

 

Prions :

Seigneur, Toi notre Père, délivre-nous nous mal.

Ne permets pas que nous soyons tentés au delà de nos forces mais fais nous toujours accepter ton aide dans l’épreuve. Que Ta volonté soit faite et qu’elle soit notre joie pour notre salut et le salut du monde.

 

 

3. Dieu nous a tous appelés à chanter sa libre louange,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

Dieu nous a tous appelés à l’union avec son Fils,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

 

 

 

 

 

5ème tableau :

Description : Marie, le disciple bien aimé et le centurion / la tunique jouée, sans déchirure / les deux condamnés avec Jésus, l’un le regardant, l’autre non.

 

                   FOI

 

Eté 1794 : la mortalité sur les deux navires prend des proportions effrayantes. Même des matelots ont été emportés par l’épidémie de typhus.

Par ailleurs, à Paris, le régime de la Terreur s’achemine vers sa fin. La Révolution dévore ses enfants et Robespierre a été guillotiné.

 

Le 7 fructidor, 20 août 1794, le débarquement des plus malades commence sur l’île Citoyenne (ex et future île Madame) où un hôpital de fortune a été installé.

Les prêtres qui se porteront volontaires comme infirmiers seront pratiquement tous emportés par la contagion.

 

En effet il est déjà trop tard et la mortalité reste énorme.

Cependant, après l’enfer des bateaux, l’île apparaît comme un purgatoire plus supportable.

(99) « il me sembla donc que je renaissais, lorsque, approchant du rivage, j’aperçus de la verdure, éparse çà et là. (.) J’aperçus un papillon : c’était beaucoup et le plaisir fut vif en le voyant ».

 

Il faut encore se cacher pour prier, donner les derniers sacrements (on présente aux mourants un crucifix taillé dans un morceau de bois). Sauf exception, c’est dans la foi commune que meurent assermentés et insermentés : la tunique du Christ qu’est l’Eglise ne sera pas déchirée…

 

Petit à petit, comme la situation à Paris évolue, la fureur des gardiens elle aussi se tempère.

Mais la libération tarde et l’hivers vient, particulièrement rigoureux. Il faut réembarquer sur les bateaux que certains n’ont d’ailleurs jamais quittés.

 

La foi qui leur a permis de tenir jusque là est à nouveau mise à rude épreuve : le calvaire semble ne jamais devoir finir.

La libération ne viendra qu’en avril 1795.

 

 

Mt 27

[48] l'un d'eux courut prendre une éponge qu'il imbiba de vinaigre et, l'ayant mise au bout d'un roseau, il lui donnait à boire.(.)

[50] Or Jésus, poussant de nouveau un grand cri, rendit l'esprit.

 

 

Sur 828 ecclésiastiques déportés à Rochefort, 546 mourront.

254 d’entre eux reposent à l’île Madame.

 

Et nous, lorsque nous sommes témoin d’une injustice (raquette, violence…), sommes-nous de ceux qui détournons la tête pour ne rien voir ?

 

 

 

Prions :

« Je crois ! Viens en aide à mon peu de foi ! » Mc 9.24

Dans les épreuves ou dans les plaisirs qui nous accaparent, aide-nous Seigneur à ne pas t’oublier, à toujours avoir foi en Toi , Toi qui a foi en nous.

 

6. Dieu nous a tous appelés à la gloire de son Royaume,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

Dieu nous a tous appelés pour les noces de l’Agneau,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

 

 

 

 

 

 

6ème tableau :

Description : Joseph d’Arimathie / mise au tombeau / Résurrection.

 

PARDON

 

Des déportés à bord des « Deux associés » avaient pris un certain nombre de résolutions :

(143) VII Ils se condamneront au silence le plus sévère et le plus absolu sur les défauts de leurs frères et les faiblesses dans lesquelles auraient pu les entraîner leur fâcheuse position, le mauvais état de leur santé et la longueur de leur peine ; ils conserveront la même charité à l’égard de tous ceux dont l’opinion religieuse serait différente de la leur ; ils éviteront tout sentiment d’aigreur ou d’animosité, se contentant de les plaindre intérieurement, et s’efforçant de les ramener à la voie de la vérité par leur douceur et leur modération.

 

De fait, les témoignages sur cet épisode malheureux de la Révolution sont rares.

Le silence des survivants et la recherche d’une réconciliation nationale firent tomber l’événement dans l’oubli.

 

En 1863, le curé de Saint-Nazaire sur Charente, l’abbé Manseau, « au cours d’une promenade solitaire aperçoit un homme agenouillé dans un champ à l’entrée de l’île Madame. Interrogeant ce paroissien sur sa dévotion insolite, le prêtre s’entendit répondre : « eh quoi ! Monsieur, vous ne savez donc pas que c’est ici que sont enterrés les saints ? » »

Oublié des clercs, la mémoire du martyre des prêtres avait été conservée dans la piété populaire.

Le 18 août 1910 eut lieu le premier pèlerinage officiel dans l’île.

 

Il ne s’agit pas de remuer le couteau dans la plaie ou de se plaindre à nouveau des excès de la Révolution. La plupart de déportés avait su déjà pardonner à ses bourreaux.

 

Mt 26

[27] Puis, prenant une coupe, il rendit grâces et la leur donna en disant : "Buvez-en tous ;

[28] car ceci est mon sang, le sang de l'alliance, qui va être répandu pour une multitude en rémission des péchés.

 

Par leur sacrifice au nom de leur fidélité au Christ et à son Eglise, les victimes de la déportation des pontons de Rochefort méritent bien pour beaucoup le titre de confesseurs de la foi pour ceux qui en revinrent et de martyrs pour ceux qui y moururent.

Leur sang a rejoint celui du Christ par lequel nous avons été pardonnés et sauvés.

 

Et nous, sommes nous des témoins du pardon de Dieu ?

 

 

Prions :

Bienheureux Jean-Baptiste SOUZI et vous ses glorieux compagnons de martyre, priez pour nous et pour notre pays.

Que Dieu nous donne la paix, sa paix.

« Il n’y a  pas de paix sans pardon »  répétait souvent le pape Jean-Paul II .

Donne-nous Seigneur ton Esprit de Paix.

 

 

 

 

5. Dieu nous a tous appelés au salut par la renaissance,

pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

Dieu nous a tous appelés au salut par l’Esprit Saint,

Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit.

 

 

 

 

NB:  les nombres entre parenthèses sont des renvois au livre du père Yves BLOMME, Les prêtres déportés sur les pontons de Rochefort, ed. Bordessoules, 1994.